Réflexions
d'André Perdreau
(visées et commentées par son père, Michel)
Speeding
Motorcycle
(paru dans Minium
Rock'n'Roll n°2 "Rock & Voitures", mai 2005)
Patti Smith et les blaireaux
(paru dans La Carte du Tendre, novembre 2005)
Tulip
(paru dans Minium Rock'n'Roll n°3 "Rock & Chaussures", mai 2006)
De la bouche des martyrs
(paru dans Minium Rock'n'Roll n°4 "Rock & Lèvres", mai 2007)
Bob retrouve Michael
(à paraître dans Minium Rock'n'Roll n°5, "Rock& Lunettes" septembre 2008.) Ici, une jolie photo.
"De la bouche des martyrs" et "Bob retrouve Michael" sont extraits de "Les Filles sont Glamour (Amour & Drogue & Rock’n’Roll)", roman à paraître
Le Top 16 des chansons de bagnoles...
Toute
la misère du monde (ou presque)
Speeding
Motorcycle (won't you change me?)
In
a world of funny changes
Il a 20 ans mais il n'est pas en grande forme. Il est
trop gros, trop lent, il a du mal à suivre. Il a bien pris un jour
un acide avec Caroline, ils ont parlé toute la nuit - il faisait
chaud, il y avait des criquets morts partout - il lui a même montré
ses dessins. Mais ca n'est pas allé plus loin avec Caroline.
We've got feeling and we're dang proud of it
Il voulait aussi séduire la bibliothéquaire et il allait tous les jours emprunter des livres. Jusqu'à ce qu'au bout de trois mois elle finisse enfin par lui adresser la parole. Mais c'est pour lui demander « Vous êtes inscrit ici ? ». « Evidemment que je suis inscrit ! Je vous ai déjà emprunté un million de bouquins ! ». Ca, c'est la réponse qu'il trouvera deux heures plus tard, à la maison, et il en fait une chanson.
Hurt you deep inside but you never slowed down
Après il est tombé amoureux de Laurie mais
elle en aimait un autre. Elle l'a épousée ; elle est enceinte.
Son mari est croque-mort, elle travaille avec lui, et Daniel, qui ne veut
pas sortir de l'adolescence se dit que le seul moyen qu'elle s'intéresse
à lui c'est de mourir. Pourquoi ne pas mourir, après tout ?
John Lennon, lui, est mort le 8 décembre 1980 et Daniel, tétanisé,
a passé la nuit a écouter la radio et à tout enregistrer.
Speeding motorcycle; always changing me
Il a 20 ans et il enregistre son oeuvre. Il enregistre ca
sur un pauvre magnéto à cassettes posé au bord du piano
de ses parents au sous-sol de la maison. Plus tard il va récupérer
un orgue électrique et c'est là-dessus qu'il écrira Speeding
Motorcycle. Ses gros doigts tapent si fort sur les touches qu'on croit entendre
un batteur.
'Cause we don't need reason and we don't need logic
Il enregistre son oeuvre et on entend dans le fond sa mère
qui l'engueule : « Trouve toi du boulot, fainéant ».
Alors Daniel va travailler au MacDo. On prend sa photo avec son balai mais
il ne sera jamais élu employé du mois. Il demande aux jolies
vendeuses de placer ses cassettes auprès des clients : « Un
sundae ou une cassette de Daniel Johnston avec votre bigmac ? ».
Il les vend aussi dans la rue.
Speeding motorcycle, the road is ours
Un jour il quittera le MacDo d'Austin et partira sur la route.
Dans un cirque par exemple. Mais pour ca il faudrait... une bécane.
Il est un peu retardé mais le rock'n'roll, il sait de quoi il s'agit.
Si tu ne peux pas avoir la fille, trouve-toi une guitare ou une bécane.
Daniel Johnston voudrait ressembler aux mâles de Steppenwolf. Ou bien
être un Hell's Angels, avec un beau blouson en cuir avec un aigle (dans
le dos) et une fille (sur le porte-bagage).
Speeding motorcycle, there's nothing you can't do
Daniel est aussi un brave garçon qui croie et cherche
pour ce monde un absolu, quelque chose de beau comme une chanson des Beatles
ou comme les cantiques qu'il chante le dimanche avec sa famille.
'Cause we don't want to wreck but we can do a lot of tricks
Un jour les medias le découvrent. Daniel téléphone
à la station de radio et hurle Speeding Motorcycle dans le combiné,
accompagné par Yo La Tengo, présent dans le studio. Yo La Tengo
a flairé le songwriter ; ils ne seront pas les derniers.
We don't have to break our necks to get our kicks
Il est un peu simple, ou carrément névrosé.
Il fera des séjours en HP. Aujourd'hui on vient souvent le voir en
concert comme on va voir un singe au zoo. Si on arrive à le croiser
backstage, on le fait parler de King Kong ou de The Incredible Hulk. On ricane.
Mais les songwriters voudraient tous avoir écrit Speeding Motorcycle.
Speeding motorcycle, don't you drive recklessly
Vingt ans après, Daniel Johnston dessine encore. Des
super-heros et des monstres. Il dessine la Speeding Motorcycle qui devait
l'enmener loin de la Virginie, loin du Texas, loin de MTV (parce que MTV c'est
Satan et Satan, c'est la douleur), loin du Mac Do ou de David Bowie qui veut
être aujourd'hui le premier à dire du bien de son nouvel album,
loin des concerts, de toutes ces scènes branchées où
il doit monter, terrorisé. Parce qu'il ne sait pas jouer de la guitare,
qu'il ne sait pas faire de blagues entre les morceaux. Parce qu'il a assez
de lucidité pour se demander ce que le public peut bien trouver à
ses shows.
Speeding motorcycle, won't you change me?
Il se dit qu'il n'a rien fait de bien depuis Speeding Motorcycle.
Mais aujourd'hui, il a des amis. Des gens qui l'aiment. C'est
déjà ca.
Speeding motorcycle, there's nothing you can't do
Un jour il partira sur sa bécane. Pour le pays calme,
le pays des Beatles, de Laurie et de Captain America. Le pays où, pour
quelques minutes, on arrive à penser à autre chose. Le pays
où on ne connait pas la douleur, celui où on enmène les
filles, assises derrière, et elles accrochent leurs bras autour de
votre taille et puis elle serrent, fort.
Speeding motorcycle of my heart
LET'S GO LET'S GO LET'S GO
Pascal REGIS, novembre 2004 - (paru dans Minium Rock'n'Roll n°2)
Le Top 16 des chansons de bagnoles...
Pascal REGIS, février 2005
Toute
la misère du monde (ou presque)
C'est un bar à
Paris.
Il est tard. C'est un
de ces bars qui restent ouverts toute la nuit. Près d'une gare. La
clientèle ; des voyageurs (ils ont raté leur train ou ils
voulaient passer une nuit de transit bien au chaud sur une banquette de
la salle d'attente mais la police est venue les faire sortir ; à
une heure à Paris, les gares ferment), des militaires, des promeneurs,
des flâneurs sans occupation déclarée ou avouable, des
clochards qui viennent dépenser une journée ou une heure de
manche. Le gérant - un gros à l'air corse en costume gris
- les fout dehors quand ils s'éternisent, avec un coup de pied dans
le cul s'ils font du tapage. II vient justement d'en vider un. On l'entend
encore crier. II remonte le long de la façade de la gare en hurlant,
il réveille les touristes allemands qui ont étalé une
longue ribambelle bleue, rouge, jaune, verte de sacs de couchage en travers
du trottoir, il fait rigoler les chauffeurs de taxis - qui refusent les
petites courses, les banlieusards, les Arabes et les nègres, qui
jouent aux dés sur les capots des voitures - les troufions lui crient
"la ferme!", mais il continue sa litanie, il la gueule à
pleine force, sans effort, sa voix sort d'un corps ridicule mais s'en va
résonner, puissante, contre les parois des immeubles, les chambres
des hôtels et les vitrines des cafés, une voix de crème
aigre tournée qui mouline l'atmosphère et les tympans, une
voix grasse, sale, un lent, très, lent écoulement de bile
qui goutte et goutte encore sur les nerfs des âmes sensibles (rares
à cette heure), que c'est pas possible de voir ça, lui qu'est
français, être foutu dehors à son âge, par un
jeune con, un truand, un Polonais, un maquereau, un pèdé,
une tantouse, un flic, un enculé, alors qu'on sert des Arabes, que
c'est un pays de merde, où être français ça ne
sert plus à rien alors, mais qu'ils crèvent, tous, lui il
se laisse pas faire , il se met pas à quatre pattes, il baisse pas
son pantalon, lui, il leur dit pas : allez-y, parce que c'est la guerre,
et il les enmerde, ils l'auront pas,
Du café, on l'entend
encore; ça couvre le flipper (un Black Pyramid que maltraitent chacun
à leur tour deux appelés qui n'arrivent jamais à allumer
le Spécial), la radio ("Rivière, ouvre ton lit"
par JohnnyHallyday sur Nostalgie); ça couvre les conversations (un
gros homme belge au visage poupin congestionné, le cou entouré
d'une grande écharpe rouge, échange quelques banalités
polies avec un jeune homme désabusé qui l’accompagnera
bientôt à son hôtel; deux pick-pockets algériens
se racontent leur journée, rient des gros Allemands et des crétins
d'Américains, comparent les couleurs de leurs plus belles prises
: vert, un billet de 100 yens, orange, avec des tournesols, 50 guiden néerlandais)
; un groupe de touristes anglais bénit chaque minute de cette merveilleuse
vingt-troisième heure française où les cafés
continuent à servir leurs clients, et braille en son honneur un medley
de "Underneath the Arches", bluette sirupeuse et sans âge
et de "Yesterday", friandise non moins sucrée ni datée;
un ancien fumeur, suçant un bâton de réglisse et buvant
des litres de bière, prêche, solitaire, l'abstinence, parle
cancer de la gorge, nicotine et triomphe de la volonté et s'avoue
atterré de l'inconscience de la jeunesse en particulier et de ses
contemporains en général.
"Je te dis d'aller
niquer ta mère, retourne dans ton pays, laisse les honnêtes
Français, qu'il y a des lois, que t'as pas le droit de leur refuser
un café, mais vous êtes tous pareils, tous, vous méritez,
contre un poteau, alignés, la Gestapo, ta ra ta ta ta, pas
de quartier ! "
Le clochard est habillé
d'un manteau gris trop large et d'un pantalon trop long, ses cheveux noirs
et blancs s'émiettent en des mèches huileuses qui balancent
devant ses yeux, vaguement loucheurs par là-même les yeux.
Il a la barbe du jour, les dents noires ou cassées, il marche en
traînant les pieds et un cageot vide,
Au comptoir du bar, il
y a Léon. Léon parle à un jeune homme. Le patron, en
le voyant s'approcher du jeune homme, lui parler puis lui payer un demi
s'est dit : encore un pédé. Pas qu'il ait quoi que ce soit
contre les pédés, non. De bons clients souvent. Celui-là
tombe même plutôt bien, parce qu'ici les consommations sont
renouvelables toutes les heures - c'est écrit sur le panneau au-dessus
du bar – et majorées de 2,50F après 22 heures, et le
petit jeune, il n'a pas la carrure à trimballer un porte-monnaie
d'athlète. Ça lui fera de l'argent de poche, une virée
avec le vieux dêgueulasse. Sont généreux,
Léon, il a tout
du vieux garçon. Soixante et quelques années. Chauve. Un tricot
de peau, une veste en laine. Des vêtements qui ont vieilli avec lui,
les couleurs restées dans les séchoirs des lavomatics, le
pantalon qui tire-bouchonne autour du pli repassé de travers, et
la doublure de la veste qui s'exhibe sournoisement dans le dos.
Le jeune homme porte
un pantalon en jean noir et une veste en jean bleu, une chemisette Lacoste
verte, un anneau à l'oreille et les cheveux mi-longs coiffés
en arrière par-dessus les oreilles et enduits de gel.
II a 22 ou 23 ans et
il s'ennuie ferme.
II s'ennuyait chez lui,
il était sortit pour se changer les idées, il s'ennuie ici.
S'il ne repousse pas
le vieux con, c'est pour ajouter l'ultime touche de pittoresque, que le
tableau soit tout à fait complet, qu'il n'y manque rien, une panade
parfaite, incontournable, criante de vérité : nulle.
Parce qu'on voudrait
rencontrer des gens mais on tombe sur ce vieux-là. Ça n'est
pas de chance. Comment rencontre-t-on des gens d'ailleurs ?
C'est un provincial émigré
à Paris.
Il se promène
le soir, la nuit, dans les bars et les cafés, dans les quartiers
chauds de Paris, puisqu'à Paris la nuit, on s'amuse. Un jeune de
province monté à Paris pour... se faire un nom (et il a déjà
un surnom : Timo), pour... l'amour de l'Art.., la littérature...
etc, etc. Ecrire... A nous deux Paris...
Il écrit des lettres
à l'ami d'enfance (le poète) resté là-bas dans
le sud, et il invente des soirées plus... parisiennes, des Deux Magots,
des Flores. Jaloux comme un bon camarade, l'autre fait semblant d'y croire.
Mais Timo ne sait pas
comment on rencontre des gens.
Le vieux bonhomme lui
parle musique.
Par une de ces coïncidences
trop bien ficelées que Timo, impitoyable critique, réprouve
chez ses futurs collègues, Léon et lui se trouvent être
tous deux amateurs de music-hall.
Cet après-midi
chez un revendeur d'occasions, Timo a trouvé un 78 tours original
de Maurice Chevalier. Il l'a payé très cher, il était
prêt à le payer beaucoup plus cher. II y a ainsi des choses,
dit-il, pour lesquelles il est prêt à laisser tout son argent
et il n'en a pas tant.
II l'a posé devant
lui sur le bar, il boit à sa santé. Maurice a des joues en
forme d'abricot et soulève coquinement son canotier. La journée
n'est donc pas perdue.
Timo est collectionneur.
Il se récite encore une fois la liste intégrale des enregistrements
de Chevalier, avec les dates et les maisons d'édition, et il souligne
mentalement les disques qu'il possède déjà.
Chacun d'eux est un petit
bonheur, chaque abscence un défi, une invite à continuer (et
c'est important une motivation). Un jour, la collection sera complète,
il pourra contempler une étendue fermée, avec un début
et avec une fin, en toute simplicité et plénitude.
Timo collectionne aussi
les disques des Stones.
- Tiens, Momo ! a dit
Léon. Un jeune qui écoute Maurice Chevalier !
- Et alors ?
- Ça m'étonne;
je croyais que c'était plus à la mode.
- Moi, je suis pas très
à la mode.
- Ah bon ? Dites-voir,
c'est un vieil enregistrement, Je crois bien que j'ai le même.
- Ah ouais ?
- Oui. J'ai une collection
- celle d'un vieil ami. Il est mort récemment. 80 ans. Et fort !
Vous auriez vu ça ! Il m'a tout laissé. Brave homme. Pas que
ça me fasse tant plaisir, vous savez. Je n'écoute plus guère
de musique. Avec l'âge, an se lasse, c'est terrible, on se limite
à quelques disques qu'on connaît bien et on les écoute
de temps à autre... Peut-être plus pour les souvenirs qu'ils
nous rappellent que pour leur valeur musicale.
- Vous voudriez en vendre
?
- Quoi ? Les disques
de Gérard ? Ma foi, pourquoi pas après tout ? Pour ce que
j'en fais... Je sais que ça a de la valeur, n'allez pas croire...
Le marché aux puces, les collectionneurs : je connais. Ah, il fallait
marchander, alors ! Mais on trouvait des merveilles. Comme
Le barman baille en regardant
son bracelet-montre et Timo, malgré l'appât du trésor
vinylique de Léon ne peut s'empêcher d'ouvrir lui aussi un
four immense que Léon ne remarque peut-être pas.
- Mais quand même...
J'aurais scrupule à les vendre. C'est une chose... qu'il m’a
confiée, n'est-ce pas ? Gagner de l'argent là-dessus... Ça
vous aurait un drôle de goût, Puis... disperser une telle collection,
quel dommage. L’oeuvre de toute une vie. Le père Gérard...
Sacré ! Un ancien plombier. Une crème. Vous comprenez ?
- Mouais... Vous faites
monter les enchères, quoi ?
- Moi ? Tenez ; je préférerais
les donner. En bloc. Mais attention ! A un amateur ! Quelqu'un
plus a même d'apprécier que moi.
- Sans blague...
Un moment de silence.
Le garçon de café
qui a tout écouté passe son torchon d'un air entendu sur le
zinc.
Léon commande
une tournée.
- Et pas du Viandox !
ajoute-t-il gaiement sans même arracher un sourire à ses interlocuteurs.
Timo et Léon regardent
le garçon retourner les verres sur le nettoyeur à pression
puis les remplir à nouveau pendant un arrêt prolongé
de la conversation.
Avec l'imminence du prochain
redémarrage, les méfiances,
les interprétations tendancieuses, l'ennui, les quêtes
inquiêtes de sujets de causerie et de points communs se bousculent
au portillon.
Le serveur, discret comme
un majordome refermant sur deux amants les portes d'un salon particulier,
recule d'un pas vers le percolateur.
Léon boit une longue gorgée. Celle-ci, augmentant soudain
traîtreusement son débit, éclabousse largement son cou
et son foulard. Dans la panique, il recule, butte violemment de la main
contre la boule nickelée pleine de morceaux de sucre, hurle et écrase
les pieds d'un employé du gaz portugais passé inaperçu
lors du panoramique d'introduction pour cause de nanisme prononcé.
"Quel maladroit
!" pensent en même temps Timo, le barman et le gérant.
"Quel con !"
couine le nain outré.
- Quand même,..
Mes excuses... Quel imbécile je fais... Quand même jeune homme,
à votre âge, Maurice Chevalier, le music-hall : c'est une autre
époque ! Et puis, ces vieux disques qui pleurnichent et qui gratouillent...
Et le laser alors ? Enfin... les goûts... Ah... C'est bien bizarre
la musique... Tenez ; je ne sais pas si vous écoutez de la musique
classique, vous y viendrez peut-être, moi aussi j'ai commencé
par les variétés, mais, bon, les orchestrations de Ray Ventura,
les flonflons, l'accordéon, très bien, mais ça va un
temps. Bon, Qu'est-ce que Je disais ? Oui ; Prenez - je ne sais pas... le
Stabat Mater. Un classique n'est-ce pas ? Pergolese, l'Italie, 1735, d'accord
? Un classique ; tout le monde d'accord. Pourtant vous n'imaginez pas l'abime
qui sépare deux interprétations. Je réécoutais
tout à l'heure un vieil enregistrement ; Bruna Rizzoli, soprano,
bon. Très bien. Pourtant, ça ne tient pas, mais alors pas
du tout, devant la version qui vient de sortir, de l'Anglais là :
Hogwood avec Emma... Machin Chose, Oh la la ! Ultime, incomparable, tout
simplement incomparable ! On redécouvre le Stabat Mater, Et grâce
à des Anglais
- Monsieur travaille
au Monde de la Musique ?
- Je vous fais rire ?
Oh je ne voulais pas faire de l'épate. C'est que... C'est dans cette
différence là... Parce que, quoi ? sur le papier, la partition,
c'est les mêmes notes ! Les mêmes. C'est comme Glenn Gould !
Il n'a pas seulement accéléré Bach ! Ah non !
- Accéléré
Bach, tiens tiens ? Vroum vroum ?
- Mais oui, pas seulement
! Glenn Gould, celui-là...! Vous vous souvenez de ses chemises ?
Et les mains, le regard ! Ah je ne peux pas en parler !
- C'est l'émotion.
Ne vous frappez pas.
L'orateur avale une gorgée
de bière et en commande deux autres.
Timo s'amuse. C'est intéressant
- et tellement pittoresque ! - d'écouter ce phénomène.
Ça pourrait faire une histoire. Un personnage, comme on dit. Il pense
à Proust (Timo pense souvent à Proust) ; "Premiers crayons
de M. de Charlus"; oui, c'est cela : "premiers crayons",
faisons notre métier. Soyons naturellement observateur. Et
puis, il y a les disques.
Sans trop l'encourager,
puisque les intentions réelles du bonhomme ne sont pas encore totalement
éclaircies, Timo consent même à participer à
la conversation.
Profitons-en pour tester notre faconde.
- Vous avez raison. Je
vais vous dire, la grande supériorité de la musique sur les
autres arts, c'est... son mutisme, si j'ose dire. On a beau faire, on ne
lui fera jamais rien dire. Même les interprètes qui forcent
le plus sur le sentiment, la pédale de vibrato, l'effet, même
les symphonies déchirantes de tous les romantiques, les Beethoven,
les Schubert : tout ça ne parle pas, ne dit rien. Des notes en l'air
et on en fait ce qu'on en veut, La littérature, avec tous ses mauvais
poètes, toutes ses "Idées", ses messages, devrait
bien en prendre de la graine. II faut se débarrasser de ce fatras.
Retrouver la "subtantifique moelle"."
A cet instant précis,
une fille en mini-jupe, assez jolie (mais "l'air garce" pense
unanimement la clientèle a 96% masculine (les seules femmes présentes
étant une anglaise et une pocharde) qui se retourne au passage de
ses cuisses), Marie Lenienska, 23 ans, étudiante en philo, amoureuse,
sort de la cabine de téléphone du café où elle
vient de parler avec l'homme de sa vie pour lui donner rendez-vous tout
a l'heure dans sa chambre afin de potasser ensemble Le Nouveau Désorde
Amoureux. En entendant Timo citer Rabelais, elle se sent envahie d'un irrépressible
mépris qui gonfle un instant sa poitrine comme le cou de L'Hamadryade
ou Cobra de Capello royal au moment du combat. La "bonne vieille moelle
rabelaisienne" est pour Marie - jeune fille livresque et à la
mode - l'étalon de la tarte à la crème, la platitude
irrattrappable qui vous classe sur le champ et à jamais dans le camp
des ennuyeux à fuir, L'idée obscène de
- Ah oui... ah. peut-être
oui... si vous voulez. C'est possible... Pourtant. . . mais il faut être
musicien, Je ne sais pas si vous jouez, .? Non ? Moi, si, Oh ! A mes moments
perdus. Notez que j'en ai beaucoup. Veuf. Bon... Comment ? Du yukulele.
Ne riez pas, c'est très difficile, Marilyn Monroe le disait bien,
d'ailleurs : c'est tout un Art. Enfin. Je voulais dire, jouer de la musique,
c'est... quelque chose... d'étrange, On parle. C'est ça :
les doigts bougent sur le manche et bientôt, vous savez, (avec un
bon niveau s'entend), vous les regardez bouger et... ça parle ! Et
ça en dit des choses ! C'est intéressant quand vous ne déchiffrez
plus la partition, que vous ne commandez plus à vos doigts, ça
se passe tout seul, quelque chose en plus que des petits points noirs imprimés
et des positions bizarres sur les cordes et des sons, Enfin, il s'agit de
musique. Les livres, je ne
- Peut-être en
effet... Et puis ça, ce sont des problèmes de cuisine interne,
c'est aussi important que la marque du stylo de l'écrivain ou le
pinceau du peintre. Ça ne nous regarde pas, nous, le public.
- Ah mais non ! Ça
n'a rien a voir, justement !
- Mais si, mais si, Tout
ça, en somme, c'est de l'exécution :pas de la création.
L'écriture, ça, c'est autre chose. Mais, gâchée
par tous ces pisse-copies, bien installés dans leur ronron.
- Ah ça, je ne
dis pas, mais...
- Croyez-moi !
- Je veux bien.,. Et
alors, comme ça, vous écrivez ?
- J'écris, oui.
Enfin, je ne suis pas dans le créneau officiel. Et puis c'est un
tel travail. Je débute.
- Ah c'est beau ! Vous avez écrit
des livres ? Un roman ?
- Oui... Pas vraiment. J'al plusieurs travaux
en cours. Mais on ne peut pas appréhender mon... travail comme ça...
je veux dire, sans une réflexion... sur le rôle de la littérature
aujourd'hui. Vous voyez ? Que. . . ce qui compte de nos jours... car tout
a été fait, vous
Vous me suivez ?
Il faudrait un exemple...
Tenez, écoutez-ça : c'est un poème que j'ai
"L'absorption de bigoudis ? On récolte use vascularisation; et... la chimiothérapie ! Façon zostérienne ! Maîtrisez-le !"
- Pas de bordel ! rugit
le gérant, mis en alerte par les éclats de voix.
- Oui. Bon, Je continue
:
"Le Kalmouk à
la jaquette yucca éclata en gravelures : "Pas sans un warrant
- en onciales ! - pour l'illustration de l'hagiograpbe désengagée
du xyste : un quart d'univers tapi, paresseux, en une noirceur de lilas.
"
...voilà.
- Et bien... en effet.. !
- Hein ? C'est autre
chose !
- Oui. Un peu... mais
bien.
- Vous suivez la démarche
?
- ...
- La démarche
: vingt-six mots principaux, chacun commençant par une lettre différente
de l'alphabet et, surtout, chacun pioché au hasard dans le dictionnaire
!
Hein ! C'est autre chose
que d'Ormesson ?!
- Ça...
Je rêve - c'est
un grand projet - d'écrire un livre où apparaîtraient,
une fois et une seule, chaque mot du dictionnaire. Chaque mot ! Vous imaginez
? Une somme ! Une Bible !
- C'est beau. C'est beau
d'avoir des projets comme ça, beau cette jeunesse. Je ne vous cache
pas que vos travaux, n'est-ce pas, je n'ai pas l'éducation pour.
Mais c'est intéressant, vraiment. Patron, remettez-nous ça,
C'est pour nous en remettre, hé hé... Ah oui, c'est beau.
Et puis quelle fougue, hein ? Pas vrai, patron ? Il nous en faudrait plus
des comme ça. On sent que vous aimez ce que vous faites, c'est bien.
Ah bien sur, vous n'êtes pas tendre avec les autres là, les
gens en place ; machin, Bobokov, Mais bon, c'est la jeunesse, ça
vous passera,
- On ne fait pas de littérature
avec de bons sentiments.
- Et bien, comme vous
y allez !
- Gide !
- Ah peut-être,
évidemment alors, mais quand même !
- Non, non, vous comprenez
: c'est eux ou moi après tout, et eux à leur époque,
croyez-moi...
- Oui bien sur mais..,
est-ce bien nécessaire ? Je ne sais pas...
- C'est la guerre !
- Mais non, c'est, pas
la guerre ! Allons, allons, jeune homme ! La guerre, si vous saviez.,, nous
on a su ! Et rappelez-vous le proverbe ; "On ne peut pas aimer les
autres si on ne s'aime pas soi même". Hein ? C'est tapé
ça !
- ... Je ne vois pas
le rapport.
- Et puis quand même
quoi, ces livres, c'est bien des gens qui vont les lire ? C'est comme la
musique : un concert sans public, c'est un peu déprimant.
- Et Glenn Gould justement
? Il en faisait des concerts ?
- Glenn Gould, justement,
il vendait des disques. Il les vendait très bien même. Non,
votre poésie, moi, je n'ai rien contre, mais... qu'est-ce que ça
raconte exactement ? Parce que si on n'y comprend rien,..
- Mais on s'en fout !
C'est complètement dépasssé cette notion-là
!
- Ah,.. ah.., Ça
alors. Mais vos romans alors, de quoi ils parlent ?
- Ils parlent... Ils
parleront... je ne peux pas en parler encore...
- Mais quand même
!
- Mais vous ne vous rendez
pas en compte ; résumer en trois mots... Vous ne réalisez
pas le travail que c'est ! Et il faudrait vous dire ça comme ça
! C'est surhumain !
- Quoi ?
- Mais... le travail
!
- Ah oui ? Allons...
- Mais oui ! Une Oeuvre...
- Une oeuvre... c'est
un travail comme un autre, j'imagine, et le travail... y'a qu'à travailler.
- Vu comme ça...
- Non, je veux bien...
c'est vrai, les jeunes, c'est "fonce dedans et dans le brouillard"
et tant pis pour ceux qui tombent de part et d'autre ; et allez ! Mais il
faut savoir garder... un peu de moralité. Voilà... Ah vous
haussez les épaules ! Ça n'est plus à la mode un mot
- De Gaulle.
- Oui. Bon. Sinon, on
se marche tous sur les pieds et on n'a plus rien à perdre quoi. Oui,
et ça c'est mauvais. Très mauvais.
- Hum...
- Ah je philosophe, je
philosophe ! Si Maman m'entendait... !
- En effet, oui.
- Eh oui...
- Je ne vois franchement
aucune raison intellectuellement valable de ne pas mépriser la majeure
partie des gens qui m'entourent. J'ajouterai même : c'est très
stimulant, C'est ainsi que naissent les grandes oeuvres, les Créations.
Lisez Nietzsche, tout est là.
- Je n'ai pas lu Nietzsche.
J'ai sûrement tort mais je ne l'ai pas lu. J'ai pas lu beaucoup. Je
n’avais pas l'inclination. Il m'en reste un peu quand même :
"C'était pendant l'horreur d'une profonde nuit..."
Hein ? Ça avait de la gueule ! Quoi d'autre ? Ah oui ! Au catéchisme,
on nous lisait ; "Au commencement était
le Verbe !" Une belle bêtise d'ailleurs ; Au commencement
était l'Emotion !
- Vous connaissez Céline
?
- Céline comment
? Je vais vous dire, moi... j'ai vécu seul longtemps, très
longtemps : deux ou trois fois ce que tu as d'années. Et les autres
étaient, (comme pour toi), autour, ou contre moi, Non : ils étaient
au-dessus. C'est ça : au-dessus, Et puis un jour, ça a changé;
il y a eu quelqu'un . Ça n'a pas duré : un an, pas plus. Je
ne vais pas me plaindre. Il y a des plus malheureux. Oh j'ai souffert mais...
c'est pas l'important. Mais cette annèe-là... vois-tu, quand
on est deux... (ah, tout de suite, je deviens gnangnan, c'est terrible)...
mais, on ne voit plus les choses pareil. Je me souviens, une fois, je m'endormais
sur le canapé. Une sieste, quoi. Et Gabrielle à coté
de moi qui feuilletait ses albums (elle collectionnait les étiquettes
de La Vache Qui Rit. Bon,) Et je me disais (dans un demi-sommeil, n'est-ce
pas ?) : "je m'endors content".
On dit "un sommeil
de bébé", tu sais. Je me souvenais de dizaines et dizaines
d'années passées où je ne m'endormais pas, mais alors
pas du tout, comme ça. Et je me pensais ; (oh, tu vas voir, c'est
un peu tiré par les cheveux) : quand on est seul, on est tellement
occupé de sa personne, qu'on trace comme un cercle autour de soi.
Comme une vitre. Pour se protéger d'abord mais après il nous
isole du monde, et plus on s'isole et plus on a peur... Alors on a tous
ces gens à Paris qui parlent tout seuls dans la rue. Tout seuls.
Mais avoir quelqu'un, c'est faire un pas et toucher, là, avec la
main, alors, hop ! plus rien, entre nous et le reste. Ah bien sûr,
on est à découvert, on va en prendre des gamelles, mais ausi...
Tout peut arriver, quoi... Et on n'a plus peur.
Léon commande
une nouvelle tournée. Du marc, cette fois, pour changer. Pour se
réchauffer.
- C'est tristement sentimental.
Flash ! Les Anglais posent
bras-dessus bras-dessous comme une équipe de football et la pocharde,
bombardée photographe, les mitraille d'éclairs réveillant
les affalés solitaires. Clic, clic ; plus de pellicule ! Ah consterné
britannique !
More ! More !
- En fait, vous êtes
religieux.
- Moi ? Pas du tout.
- Vous croyez en Dieu.
- Mais je t'assure bien
que non.
- Du calme ! dit le patron
qui resserre lentement ses cercles de surveillance autour de ces consommateurs
prodigues succeptibles de devenir bientôt "fouteurs de bordel".
Au loin comme dans un
roman policier, on entend le panier à salade qui mugit. On embarque
le clochard tapageur nocturne ou on relève Marie Lenienska qui s'est
fait violer par des passants ou par son chauffeur de taxi.
- Vous me faites quand
même bien rigoler, à me donner des leçons. C'est votre
âge qui vous permet ça ? Alors, ça serait trop facile
! Il suffirait de vivre... longtemps et on en saurait toujours plus que
les jeunes ! Et votre père, s' il était vivant, vous taperait
sur les doigts comme au premier jour, "Sais sage fiston" qu'il
dirait. Non, c'est vrai ! "Et mon garçon par ci... et quand
j'avais ton âge par là... et tu verras..." et les lieux
communs au kilomètre... "On peut pas aimer les autres... patati..."
Non mais, vous avez trouvé ça dans le Reader's Digest de l'abbé
Pierre ? De quoi vous vous mêlez ? Qu'est-ce
qui vous permet ? Allons soyons sérieux ! Je vais vous dire : cette
vitre dont vous me parlez, moi je vous vois la trimballer devant vos yeux
! Et avec des verres colorés encore ! Qui vous fait dire : oh la
belle vie bleue ! Oh la belle verte ! Mais c'est pas pour nous tout ça,
mon pote ! Ça n'existe pas. Pour nous la vie, c'est lent, et c'est
triste, Morne. Une rue sordide, une rangée de lampadaires le long
d'un trottoir. Voilà pour les couleurs, Bzzz bzz. Ça ronfle,
en voilà un qui clignote. Va bientôt s'éteindre, L'est
déjà tout blafard. Comme les autres d'ailleurs. Tous pareils.
Et chacun garde la tête droite, l'oeil baissé, chacun est très
occupé a éclairer son petit décimètre carré,
là, à ses pieds. Mais sans s'inquiéter des autres,
surtout, Pas d'enmerdements. La médiocrité. Voilà.
Voilà une image poétique ! Et avec un message en plus, vous
devriez être content. Mais les gens comme vous, ça mord dans
tous les panneaux ! Ça veut croire à tout. Comme les bigotes
protestantes, à l'armée du Salut, qui pataugent dans la merde
à longueur de journée, qui se font vomir dessus par toutes
les loques et qui restent imperturbables, tout-sourire, les connes ! Mais
regardez autour de vous, vous trouvez ça brillant ? D'ailleurs, votre
bonheur, vos siestes, le ciel bleu et les petits anges, tout ça,
c'est nul ! Qui aurait envie de ça ? Qui allez-vous convaincre ?
Ah ! comme missionnaire, vous vous posez un peu là ! Mais, il faudrait
quelque chose de 10 fois, 100 fois plus fort ! Qu'est-ce que vous y connaissez
après tout pour juger les autres ? Vous êtes l'ayatollah
du bonheur ? Et si on n'a pas envie
Les Anglais ont mis Satisfaction
sur le juke-box. Tima, emporté par son élan retrouve sa casquette
de collectionneur-rebelle des Stones et conclut en un raccourci de teenager
:
- Et puis merde ! Fuck
off man!
- Yeaaah! crient
les Anglais ravis de trouver un interlocuteur.
- Last orders!
gueule le plaisantin de la bande et d'un seul mouvement pachydermique le
troupeau hurlant se précipite contre le bar. Léon et Timo,
pris dans la meute, luttent pour garder l'équilibre de leurs verres.
Emergeant de derrière
l'épaule de pilier de rugby de Bill Cheatham, épicier à
Portsmouth, Léon lâche, juste avant d'être emporte, impuissant
et les deux bras levés au ciel :
- On est bien pourtant...
quand des fois... ça fait chaud... au coeur.
Les anglais chantent
Rule Britania. Le flipper au fond tremble soudain de ses quatre fers.
- J'espère que
vous avez mieux comme morale finale !
- Comment ?
- C'est un cliché
! hurle Timo par-dessus la mêlée,
- Du chiqué ?
crie Léon alors que - cla cla cla ! - le Black Pyramid lâche
enfin, apothéose ! ses trois parties gratuites.
Dehors, c'est 5 heures,
les lampadaires s'éteignent, la gare ouvre ses portes et les premiers
trains s'agitent, déjà prêts à partir.
Pascal REGIS, 1991
haut de page
I did not write a farewell note on the guestbook on the
official site and I did not tell the Group how I felt or how I already missed
Kevin Coyne. Maybe because I’ve been so busy with all these messages
and things to do and press releases and trying to find a (cheap) way to
go to the funeral in Nuremberg. But now, when it’s all over, why can’t
I express my grief and mourning like all my friends ?
Did you read the poem that Catherine posted on Coyne’s guestbook (« Voice of the body, voice of the soul ») ? Catherine is my girlfriend ; she sent an e-mail to tell me she posted that poem (« for Helmi and Pascal and all who love and mourn » I can hardly read this and not cry). I did not even know Catherine wrote poetry. What does it take, what do we need to relate and talk to each other (and no, I’m not just talking about my couple here). What does it take ? Death ? One of my favorite writers, Thomas Pynchon, once wrote that he believed the only real subject of a book was death. How people faced death and the idea of death.
Kevin’s death sent memories of my father’s death, some twelve years ago. That terrible feeling of injustice. And, yes, what else could matter ? What else ? Life I suppose. Life with Art. His Art, your Art, my Art. Whatever helps us to get through.
I could die, we could die ; who did not, at one time
or another, think of putting an end to a bad day. But one could also live,
thanks to Art. Kevin’s Art helped so many people. People living in
a house on the hill. People like you and me. People who need someone as
strong as Kevin. Someone who sees things in a certain way and shows them
back to you. And that helps.
I’m a fan, I love his music and lyrics. So I made
this web-site about Coyne which a lot of people enjoyed, although it only
used the stupidest part in me, the collector part ; the part of me
which writes down – tries to pin down – whan cannot be written
down : Art. Kevin would always giggle when I ventured to ask for a
biographical detail or an explanation for some strange lyric that got the
whole group puzzled. He did not care a bit about talking about all this
shit. The artist does not explain his work. His work speaks volumes. And
no more.
But Kevin loved to talk about the old days and the people
he met or played music with. Those few moments I spent talking with him
remain with me as strange out of time or space moments. Not that he was
bigger than life. For instance, Kevin loved to fart while talking... Kind
of cooled you off when you thought were in the middle of a great interview
or reminiscing. Kevin did not believe in bigger than life characters (I
reckon). Kevin believed he was an artist, is all.
So I put on another of his discs and listened. At first, it was too hard. « Something gone wrong » got me crying again. It was too soon. I remembered the 100 Club a month ago, how Kevin told me that was one of his favourite songs.
Then the music became music again, with all its healing power. It worked again.
The friend was gone, the music remained.
And I thought to myself : I could sing « Something
gone wrong » too, record a whole different version with some
sort of punk-rock guitar, the furthest possible from the original.
To show I care ? To prove myself something ?
To do something, to say : I’m alive.
And you better believe it.
Pascal REGIS, Dec 5 2004 - The Kevin Coyne cover is here
Tous ces textes sont la propriété de Pascal REGIS; merci de ne pas les utiliser sans son accord.